Le gouvernement a procédé le mercredi 17
septembre 2008 à la cérémonie officielle de restitution des corps des
victimes des événements survenus en novembre 2000 à Cosa, dans la commune
de Matoto. Organisé par le Ministère de la Réconciliation Nationale, de la
Solidarité et des Relations avec les Institutions, cet important évènement
qui s’est déroulé à l’amphithéâtre de Donka a été présidé par son
Excellence, Monsieur le Premier Ministre, Chef de Gouvernement, Dr Ahmed
Tidiane SOUARE.
La cérémonie a également connu la présence
des membres du gouvernement, des corps diplomatiques, des syndicats, de la
société civile, des parents des victimes et d’autres invités.
Nous vous livrons ici in extinso
le discours du Premier Ministre
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Messieurs les représentants des Institutions
Républicaines,
Mesdames et messieurs les membres
du Gouvernement,
Mesdames et messieurs les
représentants des corps diplomatiques et
consulaires,
Mesdames et messieurs les sages des
coordinations régionales, Vénérables
religieux,
Chers compatriotes, Mesdames et
messieurs
Le rassemblement d'aujourd'hui, marqué du sceau
de la tristesse, n'est pas habituel. Il s'agit de la cérémonie de
restitution, à leurs familles respectives, des dépouilles mortelles des
trois frères et compatriotes julien Onivogui, Pogba Béavogui et
Niankoye Loua. Au-delà du cérémonial proprement dit, c'est un
épisode de notre histoire qui se déroule sous nos yeux. En effet,
faut-il le rappeler, dès le début de l'année 1990, suite à l'éclatement de
la guerre civile au Libéria voisin, suivi quelques années plus tard par
l'embrasement de la Sierra-Léone, le territoire guinéen s'est vu contraint
de recevoir des centaines de milliers de pauvres hères qui" fuyant la
guerre, ont trouvé refuge dans notre pays. Le peuple guinéen, dans un élan
de solidarité et de fraternité humaine et africaine, a accueilli et
protégé les frères Libériens et Sierra-Léonais en détresse. Malgré le
soutien de la communauté internationale, cet afflux massif de réfugiés a
pesé lourdement sur l'évolution politique, économique et sociale de la
Guinée. La guerre civile qui a sévit dans ces pays a connu son
prolongement en territoire guinéen.
C'est dans ce contexte, souvenons-nous, que la Guinée, a
été victime des agressions menées par des forces étrangères en septembre
2000. Toutes ses régions limitrophes d'avec le Libéria et la Sierra -
Léone ont connu des incursions rebelles qui ont eu pour effet d'installer
momentanément la guerre en Guinée. La mobilisation générale des forces
nationales de défense et de sécurité derrière le Commandant en Chef des
Forces Armées Guinéennes, le Général Lansana CONTE,
surchauffé par le sursaut patriotique de tous les compatriotes, a alors
permis de défendre l'intégrité territoriale de notre nation. A cette
occasion à la fois épique et exaltante pour le peuple de Guinée, s'est
démontrée une fois de plus, la capacité de sacrifice ultime de ceux et de
celles qui ont affronté la mort pour que la Guinée en paix, libre et
souveraine.
Mesdames et messieurs,
Ces
agressions rebelles de septembre 2000 ont ainsi eu un impact traumatique
particulièrement profond sur les populations guinéennes. Le spectacle
insoutenable de corps mutilés, de femmes et d'enfants déchiquetés par des
obus, de hordes armées et droguées semant mort et désolation partout sur
son passage, des milliers et des milliers de personnes jetées sur les
routes du désarroi et du déplacement forcé ont laissé des stigmates encore
ravageurs sur la conscience collective nationale. C'est pour cette
raison qu'aujourd'hui nous devons consacrer une pensée émue et
respectueuse à la mémoire
de tous ceux
qui
ont péri pour
sauvegarder la liberté et restaurer la paix à l'intérieur des nos
frontières nationales.
Mesdames, messieurs,
S'il est
établi avec évidence que toute folie meurtrière, de l'envergure de celle
qui a menacé les fondements de la nation en l'an 2000, devait absolument
être combattue, ce désir collectif viscéral de protéger le territoire
national de la destruction et de la guerre n'a pas été malheureusement
perçu, ni compris de la même manière par tous les guinéens. C'est aussi
cela, la guerre. Engendrer l'incompréhension et la tension
sociale. C'est cette contradiction interne, inhérente à la nature
humaine et à toute société, qui constitue la cause essentielle des
événements tragiques du 30 novembre 2000 dans le quartier de Cosa Ã
Matoto. Aujourd'hui, permettez-moi, au nom du Président de la
République et au nom de la nation toute entière, de m'incliner devant les
dépouilles des victimes de cette véritable tragédie nationale. En
s'inclinant devant ces trois corps, ceux de julien Onivogui, de
Pogba Béavogui et de Niankoye Loua, nous voulons honorer toutes
les victimes, emportées par les guerres civiles qui ont ensanglanté la
sous-région ces dernières années.
Chers
compatriotes,
En organisant cette cérémonie, le
Gouvernement de la République de Guinée veut affirmer sa ferme
détermination à traduire dans les faits, les instructions du Président de
République appelant à la nécessaire réconciliation nationale et au
raffermissement de l'unité. Cela passe nécessairement par l'effacement de
la méfiance et des rancoeurs susceptibles de générer la division
sociale. J'appelle les citoyennes et les citoyens à s'inscrire dans
cette dynamique de pardon et de paix. Je demande notamment aux jeunes
d'éviter les comportements générateurs potentiels de violence. Je n'ai pas
de doute qu'ils partagent ma conviction que leur avenir, c'est-Ã -dire
celui de la nation voulue par leurs parents et qu'ils auront à léguer Ã
leurs enfants, sera d'autant plus forte qu'elle sera bâtie sur le socle de
l'unité, de la paix, de la justice de la solidarité et du
travail.
Le Gouvernement, à travers le Ministère de la
Réconciliation Nationale de la Solidarité et des Relations avec les
Institutions travaillera à enclencher un processus profond et durable de
rapprochement entre les communautés des quatre régions naturelles en
général, des communautés de la région forestière en particulier. Les sages
et les doyens de cette région du pays ont déjà entamé le travail
d'apaisement des esprits et des cœurs. Le Gouvernement les accompagnera,
tout le peuple de Guinée aussi, afin qu'ensemble nous bâtissions une
nation réconciliée, unie et prospère. Je remercie toutes celles et tous
ceux qui ont facilité la cérémonie de ce jour, particulièrement les
autorités du CHU de Donka, les familles des victimes et la Coordination
des ressortissants de la Guinée - Forestière.
A tous nos morts, la mère patrie reste à jamais
rattachée par le devoir du souvenir.
Vive la
Guinée |