Orpaillage : LA COURSE AU
TRÉSOR
Le village de
Traoréla, une petite localité située à 3 kilomètres de Kodieran et à
environ 200 km au sud de la capitale, est devenu le nouvel eldorado
vers lequel convergent en masse les populations des quatre coins du
pays. Cette nouvelle ruée vers l'or a été dopée par la découverte,
il y a quelques jours, par un orpailleur d’une pépite de 2,7 kg d'or
d'une valeur de 40 millions de Fcfa.
Depuis, la vie a été
bouleversée dans toute la commune du Gouaniaka. Tous les jours, le
rush s’amplifie vers cette bourgade qui doit son nom à feu Broulaye
Traoré, le fondateur du village. Très tôt le matin, femmes et
hommes, jeunes et vieux se dirigent vers le village qui abrite l'un
des sites les plus riches en or de la zone. Chacun y va par ses
moyens : à moto, à vélo ou par les rares véhicules de transport en
commun. Le village de Faboula et ses alentours se vident de leurs
habitants.
Sur place, les chercheurs d'or passeront toute la
journée à creuser et retourner la terre à la recherche du moindre
scintillement de métal jaune. Le visiteur qui arrive ici est frappé
par l'effervescence qui caractérise la commune dont la principale
activité est l'orpaillage. 80 % des 19.000 âmes de la
circonscription se consacrent à cette activité.
Parallèlement,
sur les placers, le commerce est florissant. Les étals s'étendent à
perte de vue et les gargotes ne désemplissent pas. L'on y trouve
tout pour se restaurer à tout moment, assure-t-on. Les artisans, eux
aussi, se frottent les mains. Des fabricants de pioche aux vendeuses
de nourriture, en passant par les négociants, chacun trouve son
compte sur les placers de Traoréla. L'or se vend le plus facilement
du monde. A 12.000 Fcfa le gramme, quand même.
« L'orpaillage,
relève Moussa, est la raison d'être de Traoréla ». « Le village a
été fondé par un chercheur d'or. Nous avons le devoir de perpétuer
cette tradition », commente t-il. L'agriculture, l'élevage ou la
pêche sont à la peine. Selon le maire de Kalana Amara Traoré,
l'histoire de l'orpaillage se confond avec celle de la commune. «
Nos parents et nos grands parents étaient des orpailleurs. Cette
activité a finalement phagocyté le secteur primaire », reconnaît
l'édile. « Aujourd'hui nous avons l'électricité, l'eau, des
infrastructures sanitaires et scolaires. Indirectement le métal
jaune y est pour quelque chose », estime-t-il.
« C'est vrai les
orpailleurs, sont pour beaucoup dans la promotion de l'or dans notre
commune. C'est grâce à eux qu'il y a eu plus d'intérêt pour l'or
chez nous », souligne pour sa part, Souleymane Sidibé, ancien maire
de la commune et actuel député, membre de la commission énergie,
mine, eau et tourisme de l’Assemblée nationale.
Mais il faut
reconnaître que depuis la découverte de N'Faly Sacko, l'engouement
pour l'orpaillage va grandissant. Tout change ici à la vitesse "V",
commente t-il.
La société minière Wassoulor-sa, propriétaire des
lieux projette de valoriser le site. Partenaire de Mansa Moussa Gold
Fund, cette entreprise opère dans la localité depuis plus d'une
dizaine d'années. Le permis d'exploitation de Wassoulor-sa englobe
la zone de Kodieran, avec cinq gisements : Kodiérani, Kobada,
Daoulila, Satikila et Traoréla.
Selon le directeur général de
Wassoulor-sa, Aliou Boubacar Diallo, la reprise de Traoréla relève
plus de besoins d'extension de la société que de toute autre
considération. « Nous n'avons nullement l'intention de faire
déguerpir les orpailleurs sans leur proposer des sources de revenus
de substitution notamment leur reconversion dans l’agriculture.
Cette mesure d’accompagnement permettra de gérer la mise en
exploitation industrielle du site sans heurts sociaux. L'entreprise
étudie actuellement des propositions qu'elle soumettra à la
communauté des orpailleurs », indique le patron de Wassoulor-sa.
Pour l'instant, les orpailleurs savourent l'indulgence de
Wassoulor-sa. Une attitude qu'ils apprécient à juste titre. "Nous
sommes très reconnaissants envers Diallo qui nous a autorisés à
occuper ses terres. Nous sommes tous conscients du temps de sursis
qu'on nous a accordé. Et nous ne serons en aucun cas ingrat envers
lui s'il veut un jour récupérer ses terres. Nous sommes prêts à
déguerpir les placers le jour où le propriétaire nous le demandera",
promet Drissa Diakité. Le chef de brigade de la gendarmerie de
Kalanan, Sidi, confirme cette attitude paisible des orpailleurs. "De
ma prise de fonction à maintenant, nous n'avons été en aucun moment
confronté à des problèmes venant des placers", affirme-t-il. Quant à
Amadou de Fabula, un autre orpailleur, il estime le temps venu de
changer de cap. « Si l'on me donne aujourd'hui une charrue et deux
bœufs de labour, je ne mettrai plus jamais les pieds sur les placers
», assure t-il.
"Nous sommes en train de voir comment on peut
développer l'agriculture ou des activités connexes", indique le
directeur général de Wassoulor-sa, Aliou Boubacar Diallo. Cette
politique n’est pas une nouveauté pour une entreprise qui, depuis sa
création en 1994, s'est investi dans la dynamique du développement
local. Elle a ainsi rétrocédé à la commune une école de six classes,
une clinique au village des orpailleurs et construit une digue à
Mounfra.
L.
DIARRA