Feu
le président Ivoirien Félix Houphouët Boigny disait que celui qui
abandonne ses amis n’aura plus d’autres amis. Et le philosophe dira que
c’est dans la souffrance qu’on connaît ses vrais amis. C’est face à ces
vérités premières et compte tenu de ses nombreuses réalisations au Mali
que le docteur Seydou Badian Kouyaté invite l’opinion publique malienne à
une action de solidarité en faveur du Guide libyen esseulé dans son
bunker de Tripoli.
Je ne connais Kadhafi que de nom, je ne l’ai jamais
approché et a fortiori, lui demander un franc mais l’homme, au regard de
tout ce qu’il a fait pour l’Afrique mérite d’être soutenu. Nous ne
devons pas le laisser à son sort. Et si nous ne réagissons pas, la
postérité aura honte de nous ".
Recevant la presse à son domicile hier jeudi à
l’Hippodrome, le docteur Seydou Badian Kouyaté, ancien ministre du plan
et de l’économie rurale du président Modibo Kéita, était très remonté
contre ce qu’il appelle " l’attitude passive de l’Union Africaine face à
ce qui se passe aujourd’hui en Libye ". Ce d’autant plus qu’il avait
reçu auparavant la visite des femmes de Bagadadji et Niarela ainsi que
celles de certains enseignants et étudiants manifestement mécontents du
sort fait par les Occidentaux et une partie de son peuple au Guide de la
Révolution du 1er septembre 1969 qui a renversé la monarchie du roi
Idriss Senoussi 1er.
Selon lui, l’UA, à défaut de rencontrer officiellement
le Colonel Kadhafi et ses opposants, aurait pu se joindre à l’initiative
du président vénézuélien Hugo Chavez. Malheureusement, l’organisation
panafricaine reste muette et lâche son grand ami dans la gueule du loup.
Car quoi qu’on dise, estime-t-il, Kadhafi est un grand
Africain qui a inscrit toutes ses actions dans la lignée de celles des
grands panafricanistes que furent Modibo Kéita du Mali, Kwame Nkrumah du
Ghana, Sékou Touré de Guinée, Gamal Abdel Nasser d’Egypte et Mohamed V
du Maroc. A contrario, " Ben Ali et Moubarak n’étaient pas des
Africains. Personne ne les a vus chez nous ", a déclaré Seydou Badian
Kouyaté. A ses dires, il y a longtemps que les Libyens trahissent
Kadhafi en procédant à des expulsions massives d’étrangers. Aujourd’hui
encore, ils continuent de plus belle à le trahir. Sinon celui qui se
dit chantre de l’unité africaine ne peut pas renvoyer les étrangers. A
ce sujet, il cite le témoignage d’un réfugié congolais qui déclare : "
si nous avons la paix c’est à cause de Mouammar Kadhafi, sinon tous les
autres nous prennent pour des mercenaires ".
Dans ce contexte, que diront alors les Maliens, à
commencer par leurs dirigeants (Alpha et ATT en particulier) qui ont
tant bénéficié des largesses du Colonel ? Ainsi, retraçant les bienfaits
du Guide, Seydou Badian dira que Kadhafi figure parmi les chefs d’Etat
de l’Afrique arabe qui ont le plus investi en Afrique noire et
singulièrement dans les Etats sahélo-sahariens. Dans ce lot, le Mali se
taille même la part du lion. Les réalisations chez nous portent sur les
hôtels, les banques, les assurances, la construction de la cité
administrative, cent mille hectares à l’Office du Niger, la formation
militaire et l’assistance à des medersas sans compter la construction
des mosquées.
Ce grand « ami et bâtisseur de l’Afrique », a dit Seydou
Badian Kouyaté, traverse un moment difficile, se traduisant par des
mouvements de révolte d’une partie de la population. Comment venir donc à
son secours surtout face à la boulimie des Occidentaux qui convoitent
le pétrole libyen ? Selon lui, il y a deux façons de faire.
En premier lieu " il faut aller le voir, lui parler, lui
dire que sa riposte est disproportionnée par rapport à l’action des
manifestants. Qu’il accepte ou pas, il faut lui dire la vérité ". En
second lieu et parallèlement, il s’agit de l’organisation d’une marche
pacifique de soutien, comme prôné par les femmes, les enseignants et les
étudiants, pour exprimer au Colonel toute notre profonde gratitude.
Cela suffira-t-il à abattre la trouille des dirigeants africains ? A
chacun ses amis.
Bruno D SEGBEDJI
11 Mars 20011.